Il ne vous aura pas échappé que la plupart des agences de traduction présentent leurs services de traduction spécialisée.
Il n’est pas rare que les demandes nous arrivent avec la précision « mon texte/ma réunion n’est pas très technique », une précision qui se veut rassurante. En réalité, ne vous inquiétez pas pour nous, les textes très techniques ne nous font pas peur ! Et le fait que votre projet soit considéré comme spécialisé ne sera pas un désavantage pour vous, au contraire.
Qu’est-ce que la spécialité en traduction ? Comment s’acquiert-elle ? comment cela se traduit-il sur la prestation effectuée ?
Décortiquons ces questions ensemble, pour mieux comprendre de quoi il est question.
Comment juger de la technicité d’un texte ou d’une prestation ?
Cet article va vous révéler un secret de fabrication de nos traductions : nous n’utilisons pas le terme « traduction spécialisée » en opposition à une traduction qui serait générale, sans difficulté. Le projet A aborde des domaines précis qui ne sont pas les domaines du projet B : ils sont spécialisés l’un par rapport à l’autre.
Voici une liste non exhaustive des spécialités qui nous sont le plus souvent demandées :
- Ingénierie
- Site web
- Rédaction publicitaire
- E-mailing et réseaux sociaux
- Traduction juridique et assermentée
- Recherche scientifique
- Agronomie, agroforesterie
- Tourisme et culture
- Traduction de documents administratifs
Ces spécialités peuvent se croiser : traduire le site web d’un industriel du recyclage du verre va demander des compétences en SEO, en manipulation sur le back office de WordPress, tout en ayant une certaine expertise dans la terminologie du recyclage, de la gestion des déchets et de l’industrie verrière.
Spécialité n’est pas rareté
La plus grande disponibilité d’une spécialité n’en fait pas pour autant une prestation facile. Nombreux de nos clients sont producteurs et vendeurs d’articles de la vie de tous les jours. La spécificité de leurs textes ne saute pas aux yeux car, du fait de la grande disponibilité sur le marché des articles qu’ils proposent, tout le monde voit déjà plutôt bien de quoi on parle, et un plus grand nombre de traducteurs sont capables de prendre en charge ces traductions.
Prenons par exemple le prêt-à-porter : nous portons tous des vêtements et avons tous dû en acheter. Pour autant, tout le monde ne connaît pas la différence entre du velours côtelé et du milleraies, traduire avec exactitude les nuances de bleu, ou différencier un col cubain d’un col droit. Quant à savoir comment les traduire, ou quel terme choisir quand plusieurs synonymes sont disponibles : c’est là que la spécialisation du traducteur entre en jeu.
Le client n’est pas le meilleur juge de la technicité de son projet
« Mon installation de machine-outil dans mon usine de fabrication de dispositifs de filtration industriels par un prestataire étranger ne nécessite pas l’intervention d’un interprète qualifié : ce n’est pas très technique, faites appel à des étudiants, ils seront ravis de rendre service et de s’exercer ! »
Vous vous en doutez, de nombreux mots-clés dans cette (véritable) demande m’ont fait sauter au plafond : non, il n’est pas possible de considérer cette demande d’interprétariat comme une mission qui ne nécessite aucune spécialisation.
Pour vous qui barbotez sans difficulté dans cet environnement depuis des années, c’est effectivement simple comme bonjour. Le professionnel d’un domaine spécialisé ne s’aperçoit plus que son métier n’est pas accessible à n’importe qui.
Dans ce cas précis il est évident que la motivation de mon client était de réduire le coût, nécessairement non négligeable, d’une intervention sur site de plusieurs semaines. Je comprends et j’entends cette contrainte économique. Mais est-ce une économie pertinente ?
Faire l’impasse sur la qualité de la compréhension entre des interlocuteurs qui ont entre les mains, non seulement plusieurs centaines de milliers d’euros de matériel, mais aussi la maîtrise de la chaîne de production, et la sécurité des opérateurs de cette machine ? Je ne doute pas que des étudiants auraient fait de leur mieux, mais de mon côté, je n’ai pas accédé à cette demande : je ne prends pas le risque de me rendre responsable d’un accident qui serait dû à une mauvaise interprétation d’une instruction par l’étudiant que j’aurais envoyé au casse-pipe en sachant pertinemment que sa formation n’était pas terminée.
La technicité là où on ne l’attend pas
Pour finir cet article sur une note un peu légère, j’ai envie de partager cette anecdote qui m’est arrivée récemment : nous avons traduit en italien une revue de communication interne pour un grand groupe agroalimentaire qui comporte de nombreux articles aux spécialités différentes : RH, construction – BTP, panification, production agroalimentaire…
La traductrice n’a pas eu de soucis à relever sur la terminologie de tous ces sujets, d’abord parce qu’elle est expérimentée, ensuite parce qu’elle connait bien le client donc elle connaissait le contexte des articles. Elle a tout de même posé une question, sur un titre étrange qui avait l’air de tomber comme un cheveu sur la soupe et dont elle ne voyait pas la pertinence dans l’article en question :
« Bonjour Claire,
Tout va bien sur la traduction en cours, mais peux-tu m’expliquer le titre page 9 : quel est donc le lien entre les bigoudènes et Tipiak ? »
Si vous avez vécu en France et eu accès à une télé dans les années 2000, vous l’avez certainement : « ils ont volé not’ recette ! »
La difficulté n’est pas toujours là où on l’attend, et c’est parfois une petite référence culturelle connue du plus grand nombre dans le pays d’origine du document qui peut mettre en difficulté le plus compétent des traducteurs. C’est là que le chef de projets de l’agence de traduction intervient, et avec grand plaisir en général !